Une journée de grève était organisée, ce mardi, à l’appel d’une large intersyndicale. Les personnels témoignent de l’impact direct de leurs conditions de travail sur leur santé.
« Justice au rabais, c’est toujours vrai ! Justice “réparée”, c’est même pas vrai ! » Magistrats, avocats, greffiers, personnel d’insertion et de probation… Ils étaient plusieurs dizaines à avoir répondu à l’appel d’une large intersyndicale, mardi 22 novembre, à midi, sur le parvis du tribunal judiciaire de Paris, en parallèle d’autres rassemblements organisés à Bobigny, Nanterre, Marseille ou Lille, pour accompagner cette journée de grève.
Partout, la même colère face aux « conditions indignes » dans lesquelles s’exerce toujours la justice, un an après le mouvement inédit qui avait embrasé l’institution, dans la foulée du suicide d’une magistrate de 29 ans, en poste à Douai.
Depuis, un autre drame est venu secouer les acteurs du monde judiciaire, avec le décès en pleine audience, à Nanterre, le 18 octobre dernier, de la juge Marie Truchet, 44 ans. La fuite opportune du rapport d’autopsie la concernant, imputant « l’AVC massif » qui l’a emportée à un « état de santé très dégradé » et non au « stress » ou à « la fatigue » semble avoir encore renforcé le ressentiment d’une profession, plus unie que jamais face à l’attentisme, voire au déni, des pouvoirs publics.
« On se sent coupable de ne pas rendre une bonne justice»
« Quand le ministre dit que la justice a été réparée, il montre qu’il est totalement déconnecté de la réalité du terrain, raconte la déléguée de l’Union syndicale des magistrats (USM) au tribunal de Paris, qui préside en ce moment l’un des procès au long cours qui se tient dans ce palais de verre, et préfère dans ce contexte garder l’anonymat. Les sous-effectifs et le manque de moyens continuent de provoquer l’épuisement des personnels et surtout une grande frustration. On se sent coupable de ne pas rendre une bonne justice. Sur ça, rien n’a changé depuis un an, sinon qu’il y a eu une mort de plus… »
Malgré plus de vingt ans de robe, la magistrate peine à retenir ses larmes quand on lui demande ce qu’elle a ressenti en apprenant le décès de sa collègue de Nanterre. « Cela fait des années que je me bats contre la souffrance au travail. Alors, voir comment on essaie de balayer cette mort, via une lamentable fuite dans les médias du rapport d’autopsie, ça fait mal. » D’autant que les témoignages ne manquent pas pour étayer le lien entre ces conditions de travail dégradées et le mal-être de nombreux personnels.