Gilles Taurand
scénariste des « particules élémentaires » ce soir sur France 2
France 2 adapte le sulfureux best-seller de Michel Houellebecq ce lundi soir en prime time.
C’est un choix audacieux que fait France Télévisions en diffusant, en 1ere partie de soirée, l’adaptation du roman de Michel Houellebecq « Les particules élémentaires », sorti en 1998, où le sexe est omniprésent. A la réalisation, Antoine Garceau (« Dix pour cent ») et au scénario, Gilles Taurand, grand complice de Téchiné. « On ressent une certaine forme de vertige en s’attaquant à une œuvre pareille… Sûrement parce que ce qui est tout à fait naturel dans un roman ne l'est pas forcément dans une adaptation. Et une des premières difficultés à laquelle j'ai été confronté, c'était de contenir dans deux fois 60 minutes ce qui se passe dans le roman de 1950 à l'aube du troisième millénaire. Au départ, on avait rêvé de six épisodes, puis c'est devenu trois. Et puis, il a fallu passer à deux pour des raisons de budget. Donc avant le tournage, nous avons, avec le réalisateur, fait une sorte d'opération quasi chirurgicale démonter, remonter, couper des passages du livre. Adapter, c’est obligatoirement trahir l’auteur. Je revendique tout à fait la position du traître. Ce qu'il faut, c'est trouver le bon traître. Est-ce que j'ai été le bon traitre ? Je n'en sais rien. Mais de toute manière, la fidélité qui ne donne lieu qu'à une illustration du roman n'a aucun intérêt. »
« Les particules élémentaires » suit le parcours de deux demi-frères, Michel et Bruno. Le premier est un génie scientifique, asexué, incapable de montrer des émotions. Le second est un agrégé de lettres obsédé du sexe. Ils ont eu pour mère une femme permissive, dépressive, égoïste, qui les a plongés dans une misère affective. Dans le livre, les scènes de sexe crues sont légion. Elles sont davantage suggérées dans la fiction, service public en prime time oblige. « Je n’ai toutefois pas le sentiment ni le souvenir de m'être particulièrement auto-censuré. Parce que ce qui m'intéressait, ça n'était pas tant la représentation concrète des scènes sexuelles que les conséquences du traumatisme chez l'un comme chez l'autre. Donc, il y a un certain nombre de scènes qui sont sexualisées. Par ailleurs, je n'avais aucune envie de tourner en dérision leur drame, comme le fait Houellebecq. Si je m'étais contenté de faire de ces deux personnages, très touchant à mes yeux et très antihéros, deux animaux de laboratoire, je pense que je n'aurais pas provoqué ce que j'espère devenir l'empathie de la part du téléspectateur. »
Michel Houellebecq n’a rien suivi du projet, et ce n’est pas sans déplaire à Gilles Taurand : » Il m'a laissé entièrement libre. Aurait-il eu la velléité de mesures d'adaptation que j'aurais refusé ! La liberté d'un scénariste, c'est que l'auteur n'ait aucun droit de regard. Peut-être qu'un jour, il me dira ce qu'il en pense. »