Selon le Haut Commissariat aux réfugiés de l'ONU (HCR), près de 7 500 enfants syriens ont été inscrits dans des écoles libanaises à fin octobre, soit 30 % du total des enfants ayant trouvé refuge au pays du Cèdre et en âge d'être scolarisés.
Trois groupes
Dans ces écoles, petits Libanais et Syriens ne suivent pas toujours les cours ensemble, notamment en raison des différences de programmes scolaires. Les matières scientifiques sont enseignées en français ou en anglais au Liban, et en arabe en Syrie. Des cours de remise à niveau leur sont ainsi proposés, à l'initiative de l'ONG Save the Children dans le nord du Liban et dans la Békaa, notamment à Bar Élias, à un jet de pierres de la frontière syrienne.
« Les enfants syriens rencontrent surtout des difficultés dans les langues et les matières scientifiques », affirme Rana Abou Salman, porte-parole de Save the Children. « Nous avons eu l'idée de leur proposer des cours de soutien les après-midi pour les aider à combler leur retard, surtout en anglais, dans des centres qui ont été mis à notre disposition par de nombreuses associations. » Et dans celui tenu par l'organisation Lebanese Active Youth (LAY) à Bar Élias, les couloirs et les salles de classe grouillent d'enfants syriens venus suivre les cours extrascolaires. « Nous avons dû répartir les enfants en trois groupes de 50 qui viennent à tour de rôle deux fois par semaine », indique Yasmine Dalle, directrice de LAY, en montrant quatre classes pleines à craquer et dans lesquelles de jeunes instituteurs s'affairent à enseigner ici les maths en anglais, là des cours d'informatique. « Nous recevons des enfants âgés entre 4 et 17 ans, en quelques semaines les progrès sont très significatifs », ajoute-t-elle.
Ahmad
« Je suis très content d'aller à l'école, au Liban je n'entends ni obus ni tirs », affirme, penaud, Ahmad, 8 ans, en tentant de taper maladroitement sur son clavier d'ordinateur. C'est que l'ordinateur, cet enfant qui a fui la guerre en Syrie il y a 4 mois, le découvre pour la première fois « émerveillé » au Liban, comme le souligne Yasmine Dalle. « C'est incroyable la faculté d'adaptation dont font preuve les enfants, en quelques jours ils se sont familiarisés avec cet outil informatique », dit-elle.
Dans cette salle où une dizaine d'ordinateurs sont installés, les enfants suivent avec assiduité les explications de l'instituteur. Démarrer l'ordinateur, taper sur le clavier, retrouver les lettres, essayer d'écrire quelques mots, ils connaissent à présent les bases de l'informatique.
« Je veux étudier, je veux réussir », affirme Yamama, 11 ans, en ajustant son petit voile sur la tête. Elle a fui Homs il y a un an et s'est inscrite à l'école publique de Bar Élias. « Sur les 30 élèves que compte la classe, le quart est syrien et nous nous entendons parfaitement bien avec nos amis libanais », dit-elle. Si elle explique, les larmes aux yeux, avoir été éloignée de ses parents durant un mois dans l'enfer de la fuite des combats avant de les retrouver au Liban, elle espère quand même pouvoir rentrer chez elle « bientôt, quand la guerre sera finie ».
« Les enfants nous disent souvent qu'ils sont très contents d'apprendre, ils ne rechignent pas à venir et l'important est que les familles sont conscientes du besoin d'envoyer leurs enfants à l'école », précise Rana Abou Salman. « Avec l'aide du HCR et de l'Unicef, nous leur assurons un cartable, un tablier et des coupons pour l'achat de livres et de fourniture scolaire. »
« One, two, three »
Dans la salle réservée aux maths, la voix d'Amir Halabla, 21 ans, résonne. « One, two, three », dit-il avant d'être repris en chœur par les enfants. « Nous leur enseignons les maths en anglais, les enfants syriens sont heureux de découvrir une nouvelle langue. Certains ont parfois l'air ailleurs et quand nous leur demandons à quoi ils pensent, ils évoquent la guerre, le traumatisme de la fuite », explique le jeune instituteur. « La violence extrême a laissé des séquelles importantes chez certains enfants, pour les aider nous leur assurons des espaces où ils peuvent se confier à des assistantes sociales ou s'exprimer à travers différentes activités », reprend Rana Abou Salman.
C'est le cas notamment d'Akram, 16 ans, originaire de Homs et blessé par une bombe au pied qui a nécessité un mois d'hospitalisation à Damas. « Je boite toujours, mais les études me font oublier mes souffrances. Plus tard, je veux être ingénieur », affirme le jeune garçon. Même s'il évoque des difficultés à s'entendre avec les Libanais de son âge à cause « de la différence de mentalité » et ne pas être « très content » au Liban, il indique préférer quand même cette situation à celle qui prévaut dans son pays. «