Oh, my, God. Mais quelle hécatombe chez les romanciers américains !
La disparition de Philip Roth est symboliquement une date très importante : nous entrons véritablement dans une nouvelle époque. Il était peut-être le dernier écrivain intégralement libre sur terre, c’est à dire un artiste qui ne cherchait jamais à plaire mais uniquement à dire la vérité. Prenez par exemple « la plainte de Portnoy » ce fut un scandale immense, une gifle au puritanisme de l’après-guerre, un pied-de-nez à l’ennui petit-bourgeois et au matérialisme, où Philip Roth se pose en digne héritier de son compatriote Henry Miller. Allongé sur le divan de son psychanalyste en 1969, Alexander Portnoy est de loin le personnage américain le plus influent de la seconde moitié du 20ème siècle après le Holden Caulfield de Salinger. Il a libéré la parole de nombreux satiristes pour des décennies, de Gary Schteingart à Jonathan Safran Foer. Il faut absolument relire ce roman délirant de liberté après le mouvement "me too" ! On n’en croit pas ses yeux.
Je rappelle que Portnoy se masturbe dans une tranche de foie de veau avant de la remettre au frigo et que le foie de veau sera servi lors du repas dominical en famille ! Bon appétit à nos auditeurs qui petit-déjeunent. Honnêtement on se demande si Gallimard publierait un texte pareil si un inconnu l’envoyait par la poste aujourd’hui...
Le billet d'humeur de Frédéric Beigbeder dans le 7/9(8h55 - 24 Mai 2018)
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