Chaque soir avant d’aller se coucher, mon ami Yves se rendait dans l'étable pour embrasser chacune de ses vaches. C’était il y a longtemps, dans le Quercy. Mais cet amour d’un éleveur pour ses vaches ne se dément pas, encore aujourd’hui. Au Salon de l’agriculture, plusieurs agriculteurs ont accepté de lever un coin de voile sur leur vie et de nous faire partager le lien extrêmement fort qu’ils entretiennent avec leurs animaux. Ils n’hésitent pas à leur glisser des mots d’amour à l'oreille ou à leur poser un baiser amoureux sur le museau.
Ils les lavent, les bichonnent, leur font les ongles – pardon, les sabots –, les coiffent, les massent. Les aiment. Ils n’attendent rien en retour, sinon un battement d’oreille, un clignement d’œil. Sous leurs dehors bruts de décoffrage, les éleveurs sont des romantiques. Leur cœur saigne quand la belle leur tourne le dos pour bombarder le sol d’une bouse dédaigneuse. C'est un amour courtois.
Cette passion immense que beaucoup d'éleveurs portent à leur vache ne va pas sans leur causer, parfois, des ennuis au sein de leur couple. Je me rappelle les réflexions d’Aimée, l'épouse de mon Yves : « Milledieu, toi et ta Marguerite ! Tu ferais mieux d’aller la rejoindre dans son lit de paille, pour ce que tu me sers ! » Oui, l'amour est plus souvent dans l'étable que dans le pré.