Nadine Morano soutient que les races existent d'un point de vue médical, et c'est encore faux !

LEUC 2015-10-11

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Déjà experte en références gaullistes, Nadine Morano s'affirme en docteur ès-sciences raciales. Malgré ses excuses adressées la veille sur le plateau du 20h de TF1, l'eurodéputée Les Républicains ne retire pas un mot de ses propos polémiques associant la France à "un pays de race blanche". Ce vendredi, l'ancienne ministre de Nicolas Sarkozy va même un peu plus loin en refusant de reconnaître que le concept de race appliqué à l'espèce humaine ne recouvre aucune réalité scientifique.

Opposée au député Les Républicains Bernard Debré sur RMC, Nadine Morano a donc répété et développé les propos qui lui ont valu son exclusion des listes de son parti aux élections régionales. Alors que son collègue, qui est également un urologue reconnu, lui opposait que le mot race appliqué à l'homme n'existait pas d'un point de vue génétique et médical, l'ancienne ministre de la Famille s'est inscrite en faux:

"Ce n'est pas ce que d'autres médecins me disent, tu vois. Il y a même des gens qui m'ont envoyé leurs analyses médicales." Et de rajouter: "Ce n'est pas ce que tous les médecins me disent. Ils m'écrivent aussi pour ça."

Bernard Debré tente alors de lui expliquer qu'on "peut greffer un rein d'un homme noir à un homme jaune, d'un homme jaune à un homme blanc" signifiant par là même que tous les hommes, quelle que soit leur couleur de peau, appartiennent à la même race. En vain. Nadine Morano n'en démordra pas.

Il ne faut pourtant pas aller chercher bien loin dans la littérature scientifique pour constater que l'inanité du concept de race appliqué à l'homme fait consensus. Le célèbre généticien Albert Jacquard l'a d'ailleurs bien résumé peu avant sa disparition. "Au XIXe siècle, on ne savait que regarder l'extérieur, l'apparence. Alors, on a classé les hommes en fonction de la couleur de leur peau. Pourquoi pas? [...] Et puis est arrivée la génétique qui a fait comprendre que l'essentiel dans un groupe humain c'est ce qui est transmissible, et ce qui est transmissible ce sont les gènes". Or, les différences génétiques des êtres humains sont parfois si complexes que "la conclusion des biologistes aujourd'hui, c'est de dire que le concept de race humaine est pratiquement sans définition. Par conséquent, il n'y a plus à en parler."

De nos jours, la quasi-totalité des généticiens ou anthropologues privilégient le mot population à celui de race. A en croire le professeur André Langaney, du laboratoire d'anthropologie de l'université de Genève cité par Sciences et Avenir, les différences génétiques au sein d'une même population sont souvent plus importantes qu'entre des peuples "noirs" et des peuples "blancs". Ainsi, "les populations “noires” d’Afrique, d’Inde et du Pacifique sont génétiquement très différentes et bien plus apparentées, chacune, à des populations à peau claire qu’elles ne le sont entre elles", rappelle-t-il.

Un constat qui ne date pas d'hier. En 1996, le prix de Nobel de Médecine François Jacob rappelait déjà que si les scientifiques parlent plus volontiers de "populations", c'est parce qu'ils ont trouvé que "les caractères dans une population varient de façon énorme et varient presque autant d'un individu à un autre que d'une population à une autre. [C'est pourquoi] ils ont presque complètement abandonné le concept de race".

Le concept d'espèce ou de population humaine s'impose donc à tous, même si celui-ci ne remet pas en cause la diversité des origines. "Plusieurs études publiées ces dernières années tendent à démontrer que des données génétiques permettent bel et bien de faire la distinction entre les individus originaires d'Europe, d'Afrique et d'Extrême-Orient, c'est-à-dire entre les populations traditionnellement réparties par la pensée ordinaire entre les trois grandes 'races': blanche, noire et jaune", écrit ainsi sur Le HuffPost Wiktor Stoczkowski, Chercheur au Laboratoire d'anthropologie sociale du Collège de France.

Pour autant, précise-t-il, ces distinctions génétiques n'ont "qu'une valeur statistique" qui ne témoigne pas, contrairement à ce qu'affirme Nadine Morano, d'une relation univoque entre la couleur de peau et une origine géographique, une nationalité voire des impératifs médicaux. En 2005 sortait aux Etats-Unis le BiDil®, un médicament contre l'insuffisance cardiaque spécifiquement dédié à la communauté noire. Une première dans l'histoire de la médecine. Mais en dépit de son succès aucune étude sérieuse n'a jusqu'ici démontré que ce traitement fonctionnait mieux sur une population de couleur que sur une autre.

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