Les “serious games” ou jeux sérieux vont-ils bouleverser les méthodes pédagogiques ? Peuvent-ils rendre les cours plus intéressants et être utiles dans toutes les matières ? Aujourd’hui, à travers le monde, ils ont de plus en plus leur place dans l‘éducation et la formation.
L‘école grenobloise des serious games
En France, l’Ecole de management de Grenoble (GEM) est un établissement de renom, pionnier en matière de jeux sérieux. En deux ans et demi, elle est devenue une référence internationale dans ce domaine. Même les Américains du prestigieux MIT viennent voir ce qu’on y développe. Hélène Michel, professeure au sein de l’Ecole et spécialiste de la question, précise : “Un serious game est un jeu qui a été conçu dès le départ avec une intention sérieuse : soit un objectif pédagogique, soit un objectif professionnel et il est utile dans trois situations : quand on veut faire passer un message qui semble trop compliqué ou tellement simple que l’on n’a pas envie d’y consacrer du temps.”
Au sein de l‘établissement, les étudiants travaillent sur la conception de jeux sérieux qu’ils soient virtuels ou de plateau, mais y sont aussi confrontés dans le cadre de leur programme : “Sur la semaine, l‘étudiant peut faire un serious game lors d’un entretien d‘évaluation,” explique le co-directeur de l’Ecole Jean-François Fiorina, “deux jours après, il en fera un autre sur la gestion des conflits, puis à la fin de la semaine, un dernier sur la gestion du stress et là encore, le principe, c’est : je suis seul face à la situation et je ne suis pas dans une posture.”
Les jeux développés au sein de l‘école intéressent notamment les professionnels : par exemple, les experts en micro- et nanotechnologies du CEA de Grenoble s’appuient régulièrement sur un jeu conçu par un étudiant de GEM pour inventer des produits.
En Thaïlande, on joue à “Sim Democracy”
Dans ce pays où la démocratie a toujours été une question délicate, une initiative vise à faire apprendre aux lycéens et étudiants comment gouverner dans une société démocratique. Des ateliers leur proposent de jouer à un jeu inventé par une professeure d’un établissement secondaire de Nonthaburi près de Bangkok. “La démocratie, ce n’est pas quelque chose qui ne s’apprend que dans les livres, c’est un mode de vie, les enfants doivent en faire l’expérience pour pouvoir comprendre les choses,” souligne Ruttikorn Vuttikorn.
Ce jeu de société nommé Sim Democracy a été élaboré par la Fondation allemande Friedrich Naumann. L’association co-organise avec les autorités thaïlandaises des ateliers éducatifs autour de cet outil dans plus de 200 lycées et universités du pays.
Le plateau du jeu représente un pays divisé en quatre secteurs : les hôpitaux pour le domaine de la santé, les écoles pour l‘éducation, les forêts pour l’environnement et les commissariats pour la sécurité. À l’issue d’une campagne électorale, une seule équipe est amenée à diriger le pays avec un budget de 25 millions de baht, la monnaie thaïlandaise.
“Graphogames” en Zambie
Dans les classements internationaux, la Zambie obtient souvent de mauvais résultats en matière d’alphabétisation. Parmi les principales difficultés, des classes surchargées.
Pour inverser la tendance, une initiative est menée dans les écoles par le biais de jeux vidéo conçus en Finlande, les Graphogames. Dans une école primaire de Lusaka, par exemple, des élèves de l‘équivalent du CP parviennent à se concentrer malgré l’effectif en classe grâce à une tablette qui leur permet de s’initier aux lettres, aux syllabes et aux mots. Les jeux sont dans la langue parlée ici, le Chinyanja. Des instructions leur sont données dans leur casque et en répondant juste aux exercices, ils gagnent des points pour leur évaluation générale. La méthode est particulièrement bénéfique pour les enfants en difficulté. Ces Graphogames proposés sous la forme de séances intensives de 20 minutes par jour viennent compléter les méthodes d’enseignement traditionnelles.
L’Université de Zambie regarde avec un intérêt particulier, ce projet qui semble donner de bons résultats.